‘Musique’

Vient de paraître sur « De Braises et d’Ombre » :

‘Musique’

‘J’aurais voulu de temps en temps être musique…’

Nicolas Régnier 1591-1667 – Apollo

Un poème d’Alain Bosquet, extrait des « Sonnets pour une fin de siècle » (1980),

dit sur l’Adagietto de la Symphonie N°5 de Gustave Mahler,

illustré par quelques tableaux choisis parmi les oeuvres des maîtres anciens…

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Extase de l’instant

Vient de paraître sur « De Braises et d’Ombre » :

Extase de l’instant

Ce n’est que dans la musique et dans l’amour qu’on éprouve une joie à mourir, ce spasme de volupté à sentir qu’on meurt de ne plus pouvoir supporter nos vibrations intérieures.

Emil Cioran

Mojca Erdmann – soprano

Repose calmement, mon tendre amour,
dors jusqu’à ce que ta bonne fortune s’éveille.
Tiens, je te donne mon portrait.
Vois comme il te sourit avec bienveillance !

Mozart, pour le voyage des sens…

Cioran pour le voyage intérieur…

Mojca Erdmann pour le voyage du cœur…

Embarquement pour l’extase ici. . . !

La leçon de musique ou le triomphe de l’attention

Vient de paraître sur « De braises et d’ombre » :

La leçon de musique ou le triomphe de l’attention

« Dans le domaine de l’intelligence, la vertu d’humilité n’est pas autre chose que le pouvoir d’attention. »

Simone Weil  – « La pesanteur et la grâce »

Pandit Ravi Shankar (1920-2012)

Sur scène, le père, Maître incontesté du « raga » fait répéter sa fille prodige du sitar…

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« Goin’ home » : itinéraire d’une mélodie

Vient de paraître sur   « De braises et d’ombre » :

« Goin’ home » : itinéraire d’une mélodie

Paul Robeson (basse) 1898-1976 – Voice of the century

Étrange écho de Negro spirituals dans ces mots de l’écrivain russe Anton Tchekhov ! Et pourtant, ce ne sont pas les chants nostalgiques afro-américains qui les ont inspirés, mais…

Antonín Leopold Dvořák (1841-1904)

Voilà donc le riche itinéraire du Largo du deuxième mouvement de la Symphonie du Nouveau Monde : une mélodie élégiaque imprégnée des senteurs des forêts de Bohème, mâtinée de la sueur âcre des esclaves cueilleurs de coton, saupoudrée de bribes des légendes indiennes du Wisconsin ou du Minnesota qui peuplent la poésie de Henry...

Billet en deux parties

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Fête de la musique

Vient de paraître sur   « De braises et d’ombre » :

Fête de la musique

Si, comme moi, pour la fête de la « musique » de ce soir, vous rêvez d’être sourd, ne fermez pas vos pavillons sans vous être accordé auparavant un dernier formidable plaisir, une sorte de cigarette du condamné : cinq prodigieuses minutes de MUSIQUE… jouées par une bande de jeunes comme on aimerait en trouver beaucoup au coin de nos rues chaque 21 juin !

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Et le baume devient poison…

« Ach, wer heilet die Schmerzen
« Des, dem Balsam zu Gift ward ? »

Goethe -« Harzreise im Winter »

Hélas, qui peut guérir la douleur
De celui à qui le baume est devenu poison ?

Goethe – Voyage dans le Harz en hiver

Ce 22 septembre 1869, à Lichtenthal, tout près de Baden-Baden, Julie Schumann, fille de Clara et Robert Schumann, épouse le comte Vittorio Amadeo Radicati di Marmorito. Johannes Brahms, fidèle et inconditionnel ami de la famille Schumann, lui offre en cadeau de mariage l’une de ses plus belles œuvres, née de la profonde déréliction dans laquelle l’a plongé l’évènement.

Quelques mois plus tôt, alors qu’elle annonçait à Johannes les fiançailles de Julie, Clara fut saisie par la grande contrariété que la nouvelle venait de provoquer chez le jeune compositeur. « Il en fut aussitôt métamorphosé et s’enferma dans sa vieille mélancolie », note-t-elle. Julie, à l’évidence, ne laissait pas Brahms indifférent, la nouvelle l’accabla.

Assurément très dépité d’avoir tu ses sentiments, Brahms devait se reprocher de s’être, une fois encore, calfeutré dans cette habituelle solitude désabusée, née sans doute d’une forme particulière de misogynie qui ne consentirait à s’effacer que devant les forces d’une passion précisément ciblée. « J’étais fait pour le cloître, disait-il quand parfois il acceptait de parler de lui-même, mais le genre de couvent qu’il m’aurait fallu n’existe pas. »

A ce point paroxystique de la déception sentimentale, Brahms entrait en fraternité sans doute avec Werther au travers de ce sentiment spectral de dénuement et d’abandon qui nimbe les rivages de la mort. Est-ce le fruit du hasard, si, en ces difficiles moments, alors même qu’il venait de terminer la composition du poignant Requiem allemand, Johannes rencontrait un poème de Goethe, « Harzreise im Winter » (Voyage dans le Harz en hiver) dont trois strophes allaient lui inspirer l’une de ses plus émouvantes compositions : la « Rhapsodie pour Alto, chœur d’hommes et orchestre » ?

Goethe par Josef Lehmkuhl

Goethe par Josef Lehmkuhl

Quelques mots nécessaires sur l’histoire de ce poème :

Avec la publication des « Souffrances du jeune Werther » en 1774, Goethe, bien malgré lui, offre à la jeunesse de son temps une sorte de bible de la désespérance amoureuse dans laquelle se reconnaissent tous les amoureux malheureux de l’époque. Nombreux sont les jeunes hommes qui, se prenant pour Werther, écrivent à Goethe, souhaitant trouver dans les réponses du poète des raisons d’espérer encore. L’un de ces jeunes déprimés, une connaissance épistolaire de Goethe, Friedrich Plessing, l’invite à venir lui rendre visite, dans la région du Harz, au centre de l’Allemagne, afin de l’aider à se défaire des idées suicidaires qui le harcèlent. Et au cours de l’hiver 1777, Goethe fait le voyage à la découverte des montagnes du Harz, et à la rencontre de son jeune correspondant qu’il commencera par aborder incognito afin de le laisser librement exprimer les causes et les formes de sa mélancolie.

Goethe écrira douze strophes qui racontent ce voyage d’hiver dans le Harz. C’est l’amorce pour le poète d’une nouvelle vision, plus philosophique, de lui-même et de son art. Trois d’entre elles (V/VI/VII) – qui forment en elles-mêmes une entité particulière – concernent sa relation avec le jeune Plessing, très déprimé, qui, réconforté par la visite du grand écrivain, finira, avec le temps, par guérir de son mal. Ainsi qu’en exprime le sincère désir Goethe dans la prière au Père d’Amour qui conclue cet ensemble.

Clara Wieck-Schumann

Clara Wieck-Schumann

C’est en découvrant la mise en musique d’une de ces strophes par un certain Reichardt que Brahms décide de composer sa « Rhapsodie », qu’il hésite d’ailleurs à éditer tant elle traduit son moi « intime », exprime ses failles et dévoile les ressorts de sa spiritualité. Mais c’est peut-être aussi pour ces mêmes raisons qu’il choisit d’en faire son cadeau de mariage à Julie.

Comme toujours, c’est à Clara qu’il réserve la primeur de ses œuvres, et c’est donc, évidemment, à Clara qu’il présente d’abord, ce jour-là, la « Rhapsodie » destinée à Julie. Il faut lire ce que Clara écrivait dans son journal, à cette date, pour percevoir combien cette composition expose à la lumière l’âme de Brahms :

« Johannes m’a présenté une pièce splendide… les mots du Voyage d’hiver dans le Harz de Goethe, pour Alto, chœur d’hommes et orchestre. Il dit que c’est « son chant nuptial pour la comtesse Julie ». Il y a bien longtemps, autant que je m’en souvienne, que je n’ai été aussi émue par la profondeur d’une souffrance exprimée par les mots et la musique. Cette œuvre me semble, ni plus ni moins que l’expression de l’angoisse de son propre cœur. Si pour une fois il pouvait parler avec cette même authenticité ! »

Cette Rhapsodie s’ouvre par une introduction orchestrale en Ut mineur – tonalité des profondeurs et des ténèbres – qui plante le décor hivernal et lugubre. La voix de contralto assène alors son angoissante question au cœur de ce paysage dramatique. Poursuivant son discours au rythme processionnaire de cet adagio, la voix laisse le soin à l’orchestre de ponctuer chaque vers comme pour amplifier la solennité du monologue.

Avec la deuxième strophe du poème, Brahms choisit un mouvement plus allant, plus lyrique aussi, pour exprimer avec toute sa sensibilité la lamentation résignée de celui que frappe ce mal romantique, enfermé dans l’impuissance de son désespoir, prisonnier tragique de sa misanthropie.

Progressivement la tonalité s’ouvre vers le majeur et avec l’entrée des chœurs pénètre la lumière de l’espérance. C’est une prière dans le style populaire cher à Brahms qui s’élève, pleine de confiance, vers le Ciel. Désormais la voix de soliste, l’orchestre et les chœurs se rassemblent, comme dans un hymne, en une communion spirituelle dominée par un sentiment d’apaisement et de sérénité.

Chant triomphal de Johannes en voie de vaincre le dépit que lui a causé le mariage de Julie ?

Réponse métaphysique à la question centrale du poème : « Qui peut guérir la douleur de celui à qui le baume est devenu poison ? » ?

Assurément, merveille de la musique ! Mahler déjà s’y profile…

Le long silence qui suit cette superbe interprétation est encore de la musique, n’est-ce pas ?

Aber abseits wer ist’s ?
Im Gebüsch verliert sich der Pfad.
Hinter ihm schlagen
Die Sträuche zusammen,
Das Gras steht wieder auf,
Die Öde verschlingt ihn.
Mais là-bas, qui est-ce ?
Son chemin se perd dans les bois
Derrière lui se referment les branchages,
L’herbe se redresse
La solitude l’engloutit.
Ach, wer heilet die Schmerzen
Des, dem Balsam zu Gift ward ?
Der sich Menschenhaß
Aus der Fülle der Liebe trank?
Erst verachtet, nun ein Verächter,
Zehrt er heimlich auf
Seinen eigenen Wert
In ungenugender Selbstsucht.
Hélas, qui peut guérir la douleur
De celui à qui le baume est devenu poison ?
De qui a bu la haine des hommes
Dans la plénitude de l’amour ?
D’abord méprisé, à présent contempteur,
Il méprise en secret le meilleur de soi
En vain égoïsme.
Ist auf deinem Psalter,
Vater der Liebe, ein Ton
Seinem Ohre vernehmlich,
So erquicke sein Herz !
Öffne den umwölkten Blick
Über die tausend Quellen
Neben dem Durstenden
In der Wüste !
S’il est dans ton psautier, Père d’Amour,
Un chant que son oreille puisse entendre,
Réconforte son cœur !
Ouvre le regard obnubilé
Sur les mille sources
Proche des assoiffés dans le désert.

D’amour ou de musique : Ne pas perdre l’instant…

« Ce n’est que dans la musique et dans l’amour qu’on éprouve une joie à mourir, ce spasme de volupté à sentir qu’on meurt de ne plus pouvoir supporter nos vibrations intérieures. Et l’on se réjouit à l’idée d’une mort subite qui nous dispenserait de survivre à ces instants. La joie de mourir, sans rapport avec l’idée et la conscience obsédante de la mort, naît dans les grandes expériences de l’unicité, où l’on sent très bien que cet état ne reviendra plus. Il n’y a de sensations uniques que dans la musique et dans l’amour ; de tout son être, on se rend compte qu’elles ne pourront plus revenir et l’on déplore de tout son cœur la vie quotidienne à laquelle on retournera. Quelle volupté admirable, à l’idée de pouvoir mourir dans de tels instants, et que, par-là, on n’a pas perdu l’instant. Car revenir à notre existence habituelle après cela est une perte infiniment plus grande que l’extinction définitive. Le regret de ne pas mourir aux sommets de l’état musical et érotique nous apprend combien nous avons à perdre en vivant. »

Emil Cioran (« Le livre des leurres » – 1936 / « Extase musicale » – Gallimard – Quarto P.115)

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« Ruhe sanft, mein holdes Leben » Zaïde (Opéra inachevé de Mozart) – Acte I

Repose calmement, mon tendre amour,
dors jusqu’à ce que ta bonne fortune s’éveille.
Tiens, je te donne mon portrait.
Vois comme il te sourit avec bienveillance !

Doux rêves, bercez son sommeil
et que ce qu’il imagine
dans ses rêves d’amour
devienne enfin réalité.

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« Pour Mozart, comme pour toute musique angélique, porter ses regards vers le bas, vers nous, est une trahison. A moins que se sentir homme soit la pire des trahisons… »

Emil Cioran (« Le livre des leurres » – 1936 / « Mozart ou la mélancolie des anges » – Gallimard – Quarto P.177)

Voix de l’invisible – Voie vers l’invisible

« L’homme où ne vit pas l’amour de la musique peut aimer ; mais il n’aime pas l’amour, et c’est un pauvre cœur que le sien. »

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« La musique est le chant secret, la voix de l’invisible et de l’inexprimable : ou, si l’on veut, elle est le seul moyen de l’exprimer. Pour qui ne la sent pas, elle n’est qu’un bruit, indiscret, morbide, plein d’ennui. »
Citations d’André Suarès rapportées par Stéphane Barsacq dans sa préface du livre     « André Suarès – Sur la musique »  (Actes Sud – Mai 2013 – page 19)

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Beethoven – Sonate N° 30 – Opus 109 en Mi majeur

Piano : Nikolai Lugansky,

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Les dernières années de la vie de Beethoven sont empreintes d’une puissance créative d’une telle intensité que l’on pourrait raisonnablement se demander si un autre artiste, avant ou après lui, a pu connaître pareille élévation.

Ludwig van Beethoven (1770-1827)

Ludwig van Beethoven (1770-1827)

Dans cette période particulièrement bouleversée par sa surdité désormais irréversible, ses dettes, sa maladie et la tentative de suicide de Karl, son neveu dont il est devenu le tuteur, Beethoven se retrouve d’autant plus isolé que son difficile caractère, versatile et colérique, se charge de l’éloigner encore plus de son cercle d’amis.

Tout entier dédié à sa création, au cours de cette dernière décennie il termine l’écriture de la 9ème symphonie et des Variations Diabelli, compose les deux Quatuors opus 130 et 131, la Missa Solemnis, et les Trois dernières sonates pour piano opus 109-110-111, son testament musical.

Le compositeur, nanti d’une expérience considérable qui le place à la pointe de son art, comprend, la cinquantaine survenant, qu’il est mortel. Dès 1818 il écrit dans son journal : « Avant mon départ pour les Champs-Élysées, je dois laisser derrière moi ce que l’Esprit Éternel a infusé dans mon âme… » En réponse à la question qu’il pouvait se poser de savoir s’il prendrait le temps de profiter de ses dernières années ou s’il continuerait son œuvre jusqu’à sa mort, on peut lire un peu plus loin : « Seul dans mon art divin puis-je trouver le support qui me permet de sacrifier la meilleure partie de ma vie aux Muses célestes. »

Si, il est vrai, l’on a toujours quelque scrupule à utiliser les adjectifs « religieux » ou « mystique » qu’inspire l’écoute des trois dernières sonates, la nature des phrases qui précèdent devrait nous encourager à assumer toute la spiritualité et la transcendance indéniablement contenues dans la géniale inventivité de ces musiques.

A visions nouvelles, langage nouveau. Les dernières compositions épousent les contours mouvementés d’une âme qui pressent déjà la fin du voyage. La musique se densifie, s’intériorise, les expressions se transforment pour mieux se libérer. Le discours se complexifie et les dernières œuvres, d’une manière générale, ne se laissent pas apprivoiser aussi facilement que les compositions généreuses et enjouées des périodes de jeunesse ou de maturité. La sonate Appassionata et la Symphonie Pastorale font désormais partie du passé du compositeur, passé inoubliable certes, mais passé.

Beethoven-piano

Ainsi la sonate opus 109, partagée entre apparence d’improvisation et écriture minutieuse de fugue ou d’adagio, se détache-t elle volontairement des conventions musicales qu’elle commence par brièvement évoquer à son début, pour suivre librement les méandres de l’âme du compositeur. Les deux thèmes opposés du court premier mouvement suffisent déjà à eux seuls à révéler son ardent désir de liberté.

Avec le deuxième mouvement Prestissimo, presque entièrement habité par le contrepoint, Beethoven plus que jamais exprime l’importance primordiale qu’il accorde au piano pour transmettre sa force créative.

Le troisième mouvement de la sonate, indiqué « gesangvoll mit innigster empfindung » (chantant avec une profonde intériorité) commence par une mélodie profonde et sereine qui constituera le thème délicieux de six variations à venir représentant plus de la moitié de la sonate entière. Beethoven revient ici à une forme baroque, plus traditionnelle. Le thème va se perdre dans la complexité virtuose des variations pour réapparaître enfin dans une grande intensité émotionnelle comme, à la fois, la voix de l’invisible et une voie vers l’invisible.

Ça, je ne pourrais pas l’oublier («They can’t take that away from me »)

Proms Last Night

Musique pour tous – Tous avec et tous pour la musique.

Comment mieux présenter la dernière soirée (The Last Night) du concert des Proms, ce festival de musique classique le plus populaire du monde, qui offre à un très large public, pendant plusieurs semaines chaque année, et depuis près de 120 ans, les musiciens classiques les plus appréciés du moment. Un bonheur musical démocratique, assurément.

Pour la dernière soirée, traditionnellement, les conventions du concert classique se relâchent et les répertoires s’ouvrent vers d’autres musiques moins familières aux artistes invités : orchestres symphoniques, chanteurs et chanteuses d’opéra, solistes classiques et autres choristes plus exercés aux cantates de Bach qu’au Negro Spiritual. Seul importe ce soir là que se fondent dans une même joie rythmée par la musique les mille différences d’une foule bariolée, jusqu’à ne faire plus qu’un seul corps chantant lorsque sont entonnés les immuables «Rule, Britannia !» de Thomas Arne, «Jerusalem» de Parry, et bien sûr le célébrissime «Land of Hope and Glory» de Elgar (toujours 2 fois !).

Parmi les « autres » musiques – que l’épithète soit considérée ici avec tout le respect qu’elle mérite –  « The Last Night » de l’année 2009, après avoir fait vibrer le public aux accords de Purcell, Haydn, Villa-Lobos et Mahler, avait inscrit au programme de l’orchestre symphonique de la BBC  un arrangement, spécialement écrit pour la circonstance, d’un merveilleux et inoubliable standard du jazz, «They can’t take that away from me».

Et pour cette « Jam session » (ou presque) la partie vocale, ce soir là était confiée à la mezzo-soprano, Sarah Connolly, qu’on entend le plus souvent exceller dans les grands airs baroques et aussi parfois chez Mahler ou Wagner ; à la trompette la très talentueuse Alison Balsom qu’aucun répertoire ne rebute et qui rivalise de virtuosité avec le regretté Maurice André.

Not so classical ! Jazzy Last Night, isn’t it ?

There are many many crazy things
That will keep me loving you
And with your permission
May I list a few

The way you wear your hat
The way you sip your tea
The memory of all that
No they can’t take that away from me

The way your smile just beams
The way you sing off key
The way you haunt my dreams
No they can’t take that away from me

We may never never meet again, on that bumpy road to love
But I’ll always, always keep the memory of

The way you hold your knife
The way we danced till three
The way you changed my life
No they can’t take that away from me

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« They can’t take that away from me »  est une composition de George et Ira Gershwin pour le film « Shall we dance ? »  de Mark Sandrich en 1937, avec Fred Astaire et Ginger Rogers.

En 1949, à l’occasion d’un film de Charles Walters, « The Barkleys of Broadway » – traduit en  français de façon très évocatrice, « Entrons dans la danse » – Fred Astaire, à nouveau partenaire de Ginger Rogers, souhaite que cette chanson soit reprise pour un duo de charme… On ne saurait mieux dire :

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Pour parodier la première strophe de cette célèbre chanson devenue un standard interprété depuis par tant de talents divers, je pourrais dire :

Il y a beaucoup beaucoup de chanteurs
Qui me font aimer cette chanson
Et avec votre permission
J’en listerais quelques interprétations

Mais ce billet alors aurait bien du mal à trouver une fin. Aussi, et puisqu’il faut choisir : sans hésiter, une version dans laquelle rien ne manque, ni le charme, ni le jazz, ni la douceur de la voix, ni la soyeuse rugosité d’ailleurs, ni, bien sûr l’indispensable trompette du maître. Une version dont je dirais bien volontiers à mon tour :

They can’t take that away from me !

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