Vient de paraître sur « De Braises et d’Ombre » :
« Café 1930 »
Le tango nous offre à tous un passé imaginaire
Jorge Luis Borges
Jorge Luis Borges
« Le Tango est foncièrement baroque : L’esprit classique avance droit devant lui, l’esprit baroque s’offre des détours malicieux, délicieux. Ce n’est pas qu’il veuille… »
Alicia Dujovne Ortiz
Quand le tango s’empare des sonorités de la corde baroque pour mieux donner à la sensualité de son expression le goût amer de la chair et de l’âme humaines lorsque la mort les caresse…
∑
A travers la cadence de ta musique
Je palpe la cruauté vive du faubourg
Comme à travers un fourreau de soie,
La lame du poignard.
Fernán Silva Valdés (1887-1975)
« Si je prends un violon dans mes mains, je crois tenir une vie ».
« Le violon est le roi du chant. Il a tous les tons et une portée immense : de la joie à la douleur, de l’ivresse à la méditation, de la profonde gravité à la légèreté angélique, il parcourt tout l’espace du sentiment. L’allégresse sereine ne lui est… pas plus étrangère que la brûlante volupté… »
[…]
Extraits illustrés de « La page des violons » in « Voyage du Condottière » de André Suarès — incontournable récit des voyages en Italie d’un esthète sensible et érudit, écrit au début du XXème siècle, dans une langue aussi belle que passionnée.
Guidé par la lune un couple d’amants marche entre les arbres d’une forêt. La jeune femme avoue à son nouveau compagnon qu’elle porte l’enfant d’un autre à qui elle s’est abandonnée un soir de désespoir. Le jeune homme comprend, accepte, pardonne et demande enfin à être le père de cet enfant comme s’il en avait été lui-même le géniteur. La chaleur de la nuit transfigure l’enfant étranger. Le couple fusionne dans la pénombre.
C’est ce thème, romantique – Ô combien ! – inspiré d’un poème symboliste d’un de ses amis, qu’Arnold Schoenberg illustre dans le sextuor « La Nuit transfigurée » (« Verklärte Nacht« ).
Mais, de grâce, que le nom d’Arnold Schoenberg ne soit pas, pour le fidèle lecteur de ces pages et l’auditeur curieux des musiques qu’elles proposent, prétexte à fuir trop vite dans une course inconsidérée vers d’autres univers musicaux supposés plus familiers. Car avec ce chef d’œuvre de la musique de chambre, Schoenberg, trop jeune encore pour s’en prendre ouvertement à notre légitime attachement à l’harmonie et à la mélodie, nous enveloppe dans le voluptueux et le soyeux des cordes que nous aimons, caressées dans le sens de la tonalité et toutes dédiées à l’évocation des images qu’elles sous-tendent.
« Verklärte Nacht » resplendit de toute la puissance de l’expressivité romantique.
Cette pièce, initialement écrite pour deux violons, deux altos et deux violoncelles, dont le compositeur écrira quelques années plus tard un arrangement pour orchestre à cordes qui magnifie la dramaturgie musicale de cette « nuit », demeure incontestablement la partition du maître qui aura laissé à sa postérité le plus séduisant souvenir. Il est vrai que l’instigateur de la « Seconde École de Vienne », fervent promoteur de la dissonance et père du dodécaphonisme sériel, n’a pas bénéficié – comme d’ailleurs ceux qui l’ont rejoint dans cette voie – de la meilleure grâce des auditeurs. Et l’on ne peut, à l’évidence, pas dire que « Erwartung » ou « Le Pierrot lunaire » fassent l’objet constant des programmations de concerts, ou des sorties discographiques, loin s’en faut.
« La nuit transfigurée », n’a jamais cessé de conquérir le public, même si l’apparition de la dissonance affirme déjà la volonté naissante du compositeur de prendre ses distances avec la tradition romantique allemande du XIXème siècle. Mais le jeune Schoenberg – 25 ans à peine quand il écrit cette œuvre à l’heure où le XXème siécle frappe déjà à la porte – est encore très admiratif des maîtres qui l’ont précédé, Johannes Brahms et Richard Wagner, et il n’est pas surprenant que sa « nuit » laisse transparaître quelques similitudes avec « Tristan und Isolde », autant par le langage musical utilisé que par les choix thématiques, malgré les destinées diamétralement opposées des deux couples.
Dans la lente introduction en mi mineur, le couple marche au clair de lune. Avec l’aveu de la femme, la musique s’anime, exposant le thème principal empreint de drame et d’émotion ; la réaction de l’homme se fait attendre. Sa réponse s’exprime enfin : l’amour triomphe, le premier thème revient, en mode majeur désormais, signe de « transfiguration ». En forme d’hymne à la rédemption par l’amour, une longue coda termine l’œuvre.
Cette œuvre qui me paraît être un tout indissociable, devant être jouée dans un souffle romantique unique, ne peut, à mon sens, supporter de coupures et partant être présentée partiellement. J’ai donc choisi d’en partager ici une splendide version pour orchestre à cordes, in extenso, par le Norwegian Chamber Orchestra dirigé par Terje Tønnesen.
Un bien beau voyage romantique dans l’amour et dans la nuit, auquel nous invitent ces musiciens rencontrés au hasard d’une promenade musicale sur les fils de la toile. (On appréciera d’autant plus leur remarquable performance qu’ils jouent sans partition, pour mieux percevoir sans doute les moindres frémissements des lumineuses métamorphoses de cette « nuit »).
Le tango pourvoyeur de souvenirs, nous forgeUn passé presque vrai. Dans ce faubourg perduC’est moi qu’on a trouvé sur le sol étendu,Un couteau dans la main, un couteau dans la gorge.
Le temps d’un « Hiver à Buenos-Aires » – Invierno Porteño – pour s’en laisser persuader, et se laisser séduire, par des musiciens hollandais…
Et de belle manière !
Arrangement pour trio (Piano-Violon-Violoncelle) d’une des « Cuatro estaciones porteñas »
[Porteño : Habitant de Buenos-Aires, enfant d’émigrants, né en Argentine]
Et la voix de Valeria Munarriz pour entendre chanter ce que Borges dit au Tango :
ALGUIEN LE DICE AL TANGO
Tango que he visto bailar Tango de aquel Maldonado Despreocupado y zafado, Tango que fuiste feliz, Desde ese ayer, ¡cuántas cosas Yo habré muerto y seguirás
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QUELQU’UN DIT AU TANGO
Tango, toi que j’ai vu danser Tango venu de ce ruisseau, Maldonado, Insouciant et effronté, Tango qui as été heureux Depuis ce passé que de choses Je serai mort, tu resteras
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Écouter pour entendre. S’écouter pour s’entendre. S’entendre et communier !
Il ne faut que quelques mesures à ces deux là pour nous en faire une démonstration des plus convaincantes. Dès lors, toute l’attention qu’ils capteront de nous ne sera qu’admiration, plaisir, délectation. De l’œuvre évidemment – le Maître Beethoven n’est pas étranger à la chose – mais aussi, et sans l’ombre d’un doute, de l’accord parfait entre un violon et un piano qui s’observent respectueusement, se répondent avec la pertinence de la délicatesse et se rejoignent dans la lucidité de la nuance. Ils s’émeuvent l’un l’autre de leur dialogue dans lequel aucun d’eux, jamais, ne prétend imposer à son vis-à-vis la pertinence de son discours par la puissance de ses moyens. Communier dans la musique : une leçon de perfection !
Comme d’ailleurs la totalité de l’enregistrement des 10 sonates pour violon et piano de Beethoven qu’ont gravé il y a quelques mois Isabelle Faust et Alexander Melnikov, deux jeunes musiciens d’exception, deux formidables complices, qui rivalisent dans cette œuvre incontournable avec les plus mémorables duos de l’histoire, tels que Clara Haskil /Arthur Grumiaux, Martha Argerich / Gidon Kremer, Vladimir Ashkenazy / Itzak Perlman, ou encore le duo d’anthologie Pierre Barbizet / Christian Ferras, et les surpassent peut-être ici.
Smoking et robe de cérémonie sont restés au fond de la penderie. Un jean, une chemise, un pull, le silence intime et religieux d’un studio de travail et la musique, rien que la musique…
Beethoven : Sonate violon et piano Op.12 – N°2
2éme mouvement : Andante, più tosto Allegretto
Isabelle Faust joue le Stradivarius de 1702 « Belle au bois dormant »
– Non, maman, pas de violon aujourd’hui !… On va voir un film super drôle avec les copines.
– Maman, s’te plaît, pas de cours de piano st’aprem, j’ai un match de foot !… C’est important!
Toujours la même rengaine, n’est ce pas ? Et chaque semaine…
Pourquoi ne pas essayer cette petite méthode ? Juste pour montrer que la musique c’est aussi la joie, le plaisir, l’amusement, la » pêche » quoi ! La » frite « , la » patate « , le » pied « !
Et ça marche aussi avec la voix, même pour chanter en finnois. Faudra juste compléter les cours de chant par les cours de langues.
Remarque : La pianiste-accordéoniste n’est pas N.K.M.Merci à mon ami Robert de m’avoir fait découvrir, ce matin, ce bien sympathique quatuor
» Le nom du quatuor a été choisi à l’occasion du 90e anniversaire du Salon Littéraire et Musical de Hamburg-Eppendorf ; il évoque aussi l’oeuvre connue de Edward Elgar, » Salut d’Amour « , un des premiers morceaux de bravoure du quatuor. L’expression suggère de plus la convivialité, le brio et l’élégante désinvolture des quatre musiciennes. » (Wikipédia)
Parfois, dans le trouble embrumé du réveil, les mots se dérobent. Comment dire alors les images du rêve désormais évanoui qui s’affichent, furtives, par à-coups, et qui voudraient encore laisser croire à la douce réalité d’un bonheur, éphémère, dissout dans la nuit passagère qui l’avait créé ?
Seule la musique, dans la quête élégiaque d’un violon, peut raconter le rêve et les émois illusoires façonnés par le songe.
– Cours ! Cours jeune fille à travers la nuit ! Vois comme elle t’a menti !
Gabriel Fauré : » Après un rêve « – Janine Jansen (violon) & Itamar Golan (piano)
Parfois les mots d’un poète inconnu spontanément s’unissent et se combinent pour raconter l’illusion brisée par le jour revenu.
La mélodie demeure…
Après le rêve, quelle plus belle voix et quelle plus belle diction que celles de Régine Crespin pour le continuer ?
Dans un sommeil que charmait ton image
Je rêvais le bonheur, ardent mirage,
Tes yeux étaient plus doux, ta voix pure et sonore,
Tu rayonnais comme un ciel éclairé par l’aurore ;Tu m’appelais et je quittais la terre
Pour m’enfuir avec toi vers la lumière,
Les cieux pour nous entr’ouvraient leurs nues,
Splendeurs inconnues, lueurs divines entrevues,Hélas! Hélas! triste réveil des songes
Je t’appelle, ô nuit, rends moi tes mensonges,
Reviens, reviens radieuse,
Reviens ô nuit mystérieuse!
Poème anonyme italien, adapté par Romain Bussine (1830-1899)
La lune, « comme un point sur un i » disait Alfred de Musset…
Mais à quelle hauteur le point au dessus du i ?
Toujours on a eu l’impression
Que cet objet astronomique
Était à portée de la main
Familier, mélancolique.Raymond Queneau
Et si la réponse était dans la fumée d’une cigarette qui, bercée par un souffle d’ange depuis l’ivoire d’un piano, virevolte jusqu’à la lune au rythme de la mélancolie…
How high the moon, Ella
Somewhere there’s music
How faint the tune
Somewhere there’s heaven
How high the moonThere is no moon above
When love is far away too
Till it comes true
That you love me as I love youSomewhere there’s music
It’s where you are
Somewhere there’s heaven
How near, how farThe darkest night would shine
If you would come to me soon
Until you will, how still my heart
How high the moon
Ou alors, qui sait, dans la danse fusionnelle et endiablée d’un archet avec les cordes d’un violon…
How high the moon, Stéphane
La chaconne c’est d’abord une danse baroque, très populaire dans le monde hispanique des XVIIème et XVIIIème siècles. et pour être plus précis : « une danse ancienne d’origine espagnole, de rythme modéré à trois temps, consistant en un certain nombre de variations sur une basse obstinée », ainsi que la définit l’ouvrage des « Sciences de la musique » édité chez Bordas. Ceux qui, à la lecture de cette définition, feraient un rapprochement avec la « Folia » ou la « Passacaille » ne seront certainement pas blâmés. Et pour cause…
L’origine du mot est mal connue, mais il semble que l’onomatopée « tchak » exprimant le son des castagnettes – ou des tambourins – ne soit pas étrangère à son étymologie. D’autres hypothèses occupent encore les musicologues, laissons les chercher en paix.
Au XVIIème siècle la chaconne, fait florès en Europe et devient musique de cour. Nombreux vont être désormais les compositeurs qui l’accueilleront dans leurs partitions, parmi lesquels on remarquera Rameau, Purcell, Pachelbel, Buxtehude et le grand Jean-Sébastien Bach avec entre autres la célèbre Chaconne de la deuxième Partita en Ré majeur (pièce maîtresse des violonistes et œuvre indispensable à emporter sur la fameuse île déserte).
Quand il est question de la magnifique chaconne de Tomaso Vitali, bien plus discrète que celle du Cantor, mais fort prisée des violonistes, au mystère des origines de la danse elle-même s’ajoute une nouvelle énigme comme le monde des arts les adore : Vitali est-il réellement le compositeur de sa chaconne ou n’est-il que le bénéficiaire d’une attribution des exégètes?
Les récentes études sembleraient confirmer la paternité du compositeur. rendant à Tomaso ce qui appartient à Vitali.
Pour l’heure, contentons-nous d’écouter sa musique, elle le mérite tellement. Et c’est bien là ce qui importe. L’Histoire…
Voici une splendide version avec orchestre, le vibrato du violon de Sarah Chang rythme le chant et la danse de superbes images de l’élan vital de la nature. Du haut de chaque sommet vertigineux, depuis le pistil de chaque fleur qui s’ouvre dans notre jardin ou depuis les plus turbulentes planètes de l’univers dans son infinie expansion, on entend subrepticement la voix de Goethe nous interroger : « La nature n’est-elle pas la vivante parure de Dieu? »
Et les cordes de répondre que sans la musique elle serait imparfaite.
Une bien beau moment!
Et puis, si le cœur a gardé un peu de place pour laisser pénétrer à nouveau l’émotion, offrons lui de réécouter cet enchantement dans une une version violon et orgue avec le très grand violoniste tchèque Josef Suk.
Pas d’images spectaculaires pour cette vision plus intimiste, plus spirituelle de la chaconne ; on pourra volontiers garder les yeux clos pour laisser chaque note venue du bout du temps nous envahir l’âme.
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