« Qui chante là quand toute voix se tait ? « Qui chante avec cette voix sourde et pure un si beau chant ? « Serait-ce hors de la ville… »
Philippe Jaccottet
La poésie se joue du temps ! Celle du poète Rückert répond à celle d’un autre poète Jaccottet à travers la musique de Mahler et la voix de José van Dam.
Leurs chants sont plus beaux que les hommes, plus lourds d’espoir, plus tristes, plus durables. Plus que les hommes j’ai aimé leurs chants J’ai pu vivre sans les hommes jamais sans les chants ; il m’est arrivé d’être infidèle à ma bien aimée, jamais au chant que j’ai chanté pour elle ; jamais non plus les chants ne m’ont trompé.
Quel que soit leur langage j’ai toujours compris tous les chants.
En ce monde, de tout ce que j’ai pu boire et manger, de tous les pays où j’ai voyagé, de tout ce que j’ai pu voir et entendre, de tout ce que j’ai pu toucher et comprendre, rien, rien ne m’a rendu jamais aussi heureux que les chants. Les chants des hommes.
Nazim Hikmet – 1902-1963
Poème écrit le 20 septembre 1960
Nazim Hikmet (in « Il neige dans la nuit » – Poésie Gallimard)
Écouter pour entendre. S’écouter pour s’entendre. S’entendre et communier !
Il ne faut que quelques mesures à ces deux là pour nous en faire une démonstration des plus convaincantes. Dès lors, toute l’attention qu’ils capteront de nous ne sera qu’admiration, plaisir, délectation. De l’œuvre évidemment – le Maître Beethoven n’est pas étranger à la chose – mais aussi, et sans l’ombre d’un doute, de l’accord parfait entre un violon et un piano qui s’observent respectueusement, se répondent avec la pertinence de la délicatesse et se rejoignent dans la lucidité de la nuance. Ils s’émeuvent l’un l’autre de leur dialogue dans lequel aucun d’eux, jamais, ne prétend imposer à son vis-à-vis la pertinence de son discours par la puissance de ses moyens. Communier dans la musique : une leçon de perfection !
Comme d’ailleurs la totalité de l’enregistrement des 10 sonates pour violon et piano de Beethoven qu’ont gravé il y a quelques mois Isabelle Faust et Alexander Melnikov, deux jeunes musiciens d’exception, deux formidables complices, qui rivalisent dans cette œuvre incontournable avec les plus mémorables duos de l’histoire, tels que Clara Haskil /Arthur Grumiaux, Martha Argerich / Gidon Kremer, Vladimir Ashkenazy / Itzak Perlman, ou encore le duo d’anthologie Pierre Barbizet / Christian Ferras, et les surpassent peut-être ici.
Smoking et robe de cérémonie sont restés au fond de la penderie. Un jean, une chemise, un pull, le silence intime et religieux d’un studio de travail et la musique, rien que la musique…
Beethoven : Sonate violon et piano Op.12 – N°2
2éme mouvement : Andante, più tosto Allegretto
Isabelle Faust joue le Stradivarius de 1702 « Belle au bois dormant »
Car le poète est un four à brûler le réel. De toutes les émotions brutes qu’il reçoit, il sort parfois un léger diamant d’une eau et d’un éclat incomparables. Voilà toute une vie comprimée dans quelques images et quelques phrases. Pierre Reverdy
L'oreille du taureau à la fenêtre De la maison sauvage où le soleil blessé Un soleil intérieur de terre Tentures du réveil les parois de la chambre Ont vaincu le sommeil Paul Eluard