Quel plus formidable ensorceleur pour exorciser 2020 et balayer enfin les derniers soubresauts maléfiques de l’an mauvais dans un impétueux tourbillon de musique, que le grand sorcier lui-même, né il y a 250 ans et quelques jours :Ludwig van Beethoven?
Guidé par la lune un couple d’amants marche entre les arbres d’une forêt. La jeune femme avoue à son nouveau compagnon qu’elle porte l’enfant d’un autre à qui elle s’est abandonnée un soir de désespoir. Le jeune homme comprend, accepte, pardonne et demande enfin à être le père de cet enfant comme s’il en avait été lui-même le géniteur. La chaleur de la nuit transfigure l’enfant étranger. Le couple fusionne dans la pénombre.
C’est ce thème, romantique – Ô combien ! – inspiré d’un poème symboliste d’un de ses amis, qu’Arnold Schoenberg illustre dans le sextuor « La Nuit transfigurée » (« Verklärte Nacht« ).
Arnold Schoenberg (1874-1951) – Self portrait 1911
Mais, de grâce, que le nom d’Arnold Schoenberg ne soit pas, pour le fidèle lecteur de ces pages et l’auditeur curieux des musiques qu’elles proposent, prétexte à fuir trop vite dans une course inconsidérée vers d’autres univers musicaux supposés plus familiers. Car avec ce chef d’œuvre de la musique de chambre, Schoenberg, trop jeune encore pour s’en prendre ouvertement à notre légitime attachement à l’harmonie et à la mélodie, nous enveloppe dans le voluptueux et le soyeux des cordes que nous aimons, caressées dans le sens de la tonalité et toutes dédiées à l’évocation des images qu’elles sous-tendent.
« Verklärte Nacht » resplendit de toute la puissance de l’expressivité romantique.
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Cette pièce, initialement écrite pour deux violons, deux altos et deux violoncelles, dont le compositeur écrira quelques années plus tard un arrangement pour orchestre à cordes qui magnifie la dramaturgie musicale de cette « nuit », demeure incontestablement la partition du maître qui aura laissé à sa postérité le plus séduisant souvenir. Il est vrai que l’instigateur de la « Seconde École de Vienne », fervent promoteur de la dissonance et père du dodécaphonisme sériel, n’a pas bénéficié – comme d’ailleurs ceux qui l’ont rejoint dans cette voie – de la meilleure grâce des auditeurs. Et l’on ne peut, à l’évidence, pas dire que « Erwartung » ou « LePierrot lunaire » fassent l’objet constant des programmations de concerts, ou des sorties discographiques, loin s’en faut.
« La nuit transfigurée », n’a jamais cessé de conquérir le public, même si l’apparition de la dissonance affirme déjà la volonté naissante du compositeur de prendre ses distances avec la tradition romantique allemande du XIXème siècle. Mais le jeune Schoenberg – 25 ans à peine quand il écrit cette œuvre à l’heure où le XXème siécle frappe déjà à la porte – est encore très admiratif des maîtres qui l’ont précédé, Johannes Brahms et Richard Wagner, et il n’est pas surprenant que sa « nuit » laisse transparaître quelques similitudes avec « Tristan und Isolde », autant par le langage musical utilisé que par les choix thématiques, malgré les destinées diamétralement opposées des deux couples.
David Hockney – Tristan und Isolde-VI – 1987
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Dans la lente introduction en mi mineur, le couple marche au clair de lune. Avec l’aveu de la femme, la musique s’anime, exposant le thème principal empreint de drame et d’émotion ; la réaction de l’homme se fait attendre. Sa réponse s’exprime enfin : l’amour triomphe, le premier thème revient, en mode majeur désormais, signe de « transfiguration ». En forme d’hymne à la rédemption par l’amour, une longue coda termine l’œuvre.
Cette œuvre qui me paraît être un tout indissociable, devant être jouée dans un souffle romantique unique, ne peut, à mon sens, supporter de coupures et partant être présentée partiellement. J’ai donc choisi d’en partager ici une splendide version pour orchestre à cordes, in extenso, par le Norwegian Chamber Orchestra dirigé par Terje Tønnesen.
Un bien beau voyage romantique dans l’amour et dans la nuit, auquel nous invitent ces musiciens rencontrés au hasard d’une promenade musicale sur les fils de la toile. (On appréciera d’autant plus leur remarquable performance qu’ils jouent sans partition, pour mieux percevoir sans doute les moindres frémissements des lumineuses métamorphoses de cette « nuit »).
Après avoir regardé un instant le portrait de Ludvig Holberg – dont nos livres d’Histoire, toutes générations confondues, ont gardé secrète l’existence – on ne devrait pas tirer grand mérite à affirmer que son temps c’est le XVIIIème siècle.
Consultation faite, on replacera l’homme plus précisément dans la première moitié du siècle, et géographiquement dans les pays nordiques, sa biographie nous apprenant qu’il quitte à l’âge de 18 ans la Norvège où il est né pour s’installer au Danemark, plus favorable à la vie intellectuelle de l’époque, où il meurt, honoré et reconnu, à l’âge de 70 ans.
Homme de lettres et historien, polyglotte, ayant voyagé longuement en Europe, il va contribuer par ses œuvres à fixer la langue de ces deux pays, et partant à satisfaire le puissant désir exprimé par les rois Frédéric IV et Frédéric V de remplacer le latin par une langue littéraire danoise. Norvège et Danemark étaient à cette époque regroupés sous la même couronne du Danemark.
Il était donc légitime que la Scandinavie, en 1884, à l’occasion du bicentenaire de la naissance de Ludvig Holberg, ait souhaité rendre hommage à l’illustre écrivain. Le gouvernement norvégien demanda alors naturellement à son plus grand compositeur, Edward Grieg, gloire scandinave de la fin du XIXème, et lui aussi natif de Bergen, de composer pour la circonstance une cantate dont il dirigerait l’interprétation le jour de la cérémonie… en plein air.
Edvard Grieg (Bergen 1843 – Bergen 1907)
Il n’avait toutefois pas échappé au compositeur que Holberg était né un 13 décembre…
Norvégien et fier de l’être, certes, mais malgré tout frileux, Grieg, pour éviter la représentation extérieure, donna sa préférence à une suite pour piano – son instrument de prédilection -, dans le style de l’époque, très inspirée des suites de Bach. Il décida de la transcrire pour orchestre à cordes enchainant ainsi à jamais sous le titre de Suite Holberg , ou plus exactement Suite op.40 : « Du temps de Holberg », les cinq mouvements traditionnels des compositions baroques : Prélude – Sarabande – Gavotte – Air – Rigaudon, qui vinrent encore enrichir les innombrables succès du Maître norvégien.
Et voilà, une nouvelle fois, un illustre écrivain, « le Molière scandinave », en l’occurrence – comme on a parfois surnommé Holberg -, dont la postérité ne doit d’avoir franchi les étroites limites de ses frontières nationales qu’aux talent, à la célébrité et à l’irradiation universelle d’un musicien. – Aurions-nous déjà oublié ce que la mémoire de Aloysius Bertrand doit à Ravel ?
La suite Holberg, depuis sa création, n’a jamais manqué de trouver une place de choix dans le répertoire des formations pour cordes et dans les sélections musicales des auditeurs du monde entier.
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Pour preuve que le succès de cette œuvre franchit allègrement les siècles sans trier parmi les générations, pourquoi ne pas en écouter le dernier mouvement, Rigaudon, avec ses immanquables allusions à Bach, évidemment, mais aussi ses quelques références folkloriques.
Et à l’accordéon, s’il vous plaît, par un duo de jeunes filles, bien de notre temps, qui s’en donnent à cœur joie. Enchantement et vitalité. Jubilatoire!
Duo Toeac : Pieternel Berkers et Renée Bekkers
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Mais il serait légitime de vouloir retrouver ou découvrir une interprétation classique et conventionnelle de cette magnifique suite. La jubilation, certes différente, n’en serait pas moindre. Surtout si l’on a choisi l’interprétation tout en équilibre, profonds contrastes et chaudes sonorités, de l’incontournable FranzLiszt Chamber Orchestra de Budapest, dirigé du violon par son directeur artistique, Jànos Rolla.
Les cordes en majesté !
I. Prélude – II. Sarabande
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Ce billet, déjà long, devrait s’arrêter là, et c’est bien ainsi qu’il avait été conçu initialement. Mais la gourmandise est trop forte : je ne résiste pas au plaisir d’insérer ici la suite de l’œuvre, confiée maintenant aux enthousiastes musiciens du Norwegian Chamber Orchestra dirigés par Terje Tønnesen. Les voilà tous prêts à danser dans le jardin un beau week-end d’été.
Leur musique, incontestablement, a revêtu sa plus belle robe de fête.
III. Gavotte
IV. Air (Andante religioso)
V. Rigaudon
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Je retiendrai cet article comme l’un des plus heureux que j’aurais, jusqu’à présent, publiés sur ce blog. Puissè-je vous avoir transmis une part de ce bonheur !
Il y a toujours une magie indéfinissable, pleine d’un irrésistible charme, dans le mariage des cordes et du vent. Sans doute, ainsi posé, le constat appellerait-il à une échappée des sens vers les harmonies imaginaires composées par le vent jouant à travers les cordes d’une immense lyre offerte à sa caresse.
Mais, plus prosaïquement, – et sans lui ôter sa part de poésie – c’est l’union sonore de deux instruments issus de familles que tout oppose, qui intéresse le propos. Association surprenante parfois, des cordes « aristocratiques », féminines, riches d’un répertoire multiple venu d’un passé ancestral, et de l’instrument à vent, plus récent, plus populaire aussi par ses origines, exigeant souvent au premier abord, plutôt le bras du soldat portant le tuba que la main gracile effleurant la viole.
Faut-il, pour témoigner de la magie de cette union, rappeler le célèbre Concerto pour flûte et harpe de Mozart, ou les moins connus, peut-être, Octuor pour cordes et vents de Schubert, ou Septuor pour cordes et vents de Beethoven?
Plus près de nous, avec le jazz (guitare et saxophone par exemple) et surtout avec les musiques sud-américaines, le mariage « cordes-vent » a produit de merveilleux arrangements aux sonorités envoûtantes. Qui résisterait aux langueurs du bandonéon d’Astor Piazzola, quand, sensuellement, les cordes du violon viennent enlacer son souffle timide exhalant sa tristesse?
Les musiciens brésiliens, eux aussi, ont merveilleusement associé ces deux univers sonores dans une multitude de fééries mélodiques et rythmiques puisées le plus souvent dans les rues et les villages. Quand deux d’entre eux, formidables instrumentistes, se rencontrent pour mêler leur virtuosité et leurs histoires musicales chargées des sourires et du soleil des deux bouts du Brésil, nous ne saurions bouder notre plaisir. Il n’est pas si fréquent de voir s’accoquiner l’accordéon et la guitare, et si l’on peut penser à priori que ce mariage ressemble fort à celui de la carpe et du lapin, c’est que l’on ne prend pas en compte l’exceptionnelle qualité de nos invités… tout simplement parce qu’on ne les pas encore entendus :
Plaisir de jouer, joie de jouer ensemble, bonheur unique de partager !
A la guitare à 7 cordes : Yamandu Costa. Virtuose très précoce, il se consacre dès ses débuts aux musiques régionales du sud du Brésil, puis s’ouvre aux autres musiciens brésiliens comme Baden Powell ou Tom Jobim avant de s’intéresser aux autres formes musicales. Il n’en adopte aucune et n’entre dans aucune catégorie.
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A l’accordéon : Dominguinhos, décédé en juillet 2013, à 72 ans. Compositeur et accordéoniste particulièrement apprécié, formé aux musiques du nord du Brésil par le maître Luis Gonzaga. Ayant été musicalement exempté des influences européennes, africaines ou indiennes, Dominguinhos a développé un style propre de « Musique populaire brésilienne », reconnu et acclamé dans le monde entier.
C’est bon le sel sous le soleil : sur une tomate fraîche avec un filet d’huile d’olive et une feuille de basilic, en lit de cuisson sur un barbecue pour quelques sardines à peine sorties de l’eau, mais pour une guitare…
Eh bien c’est bon aussi, regardez!
Ah, vous pensez que cela donne aux cordes une étrange façon de vibrer! Non! L’effet stroboscopique est dû à la grande vitesse d’obturation choisie pour la prise de vues.
Pour l’oreille…? Que du bonheur! Pour l’œil aussi!
Michael Lucarelli joue « Malaguena »
Lieu : Bonneville Salt Flats (Plaine de sel au Nord-Ouest de l’Utah – USA)
La Russie a toujours apprécié les affinités créatrices entre compositeur et interprète, et nombreuses sont les œuvres du XIXème ou XXème siècles qui doivent leur existence et leur essence même parfois, aux solistess pour lesquels elles ont été écrites. Ainsi Tchaïkovski et le pianiste Nikolaï Rubinstein (Trio avec piano), ainsi Prokofiev et un autre grand pianiste Sviatoslav Richter, ainsi Chostakovitch et le célèbre Mstislav Rostropovitch (Concerto pour violoncelle) ou le légendaire David Oïstrakh (Concerto pour violon N°1). Ces deux derniers instrumentistes étaient liés d’une chaleureuse amitié avec le compositeur.
Staline et Jdanov
Jusqu’à sa mort en 1948, Andreï Jdanov, bras droit du violent Staline, veille sur les arts soviétiques avec rigueur, mais les thèses manichéennes et réductrices de son « réalisme socialiste » appliqué au domaine artistique lui survivent. Chostakovitch, en constant atermoiement avec le régime, entre obligation de se conformer au politiquement correct, d’une part, et le légitime désir de conserver sa liberté créatrice, d’autre part, avait pris soin de conserver cachée depuis 1948 la partition de son premier concerto pour violon, dédié à David Oïstrakh. Ce n’est qu’en octobre 1955, plus de deux ans après la mort de Staline, que l’œuvre sera donnée, avec au violon son talentueux dédicataire, et à la baguette, dirigeant l’Orchestre Philharmonique de Leningrad, le très sévère Ievgueni Mravinski.
David Oistrakh (1908-1974)
Ievgueni Mravinsky (1903-1988)
Concerto pour violon et orchestre N°1 (Op.99)
Oïstrakh disait de sa partie, dans ce concerto, qu’elle constituait « un puissant rôle « shakespearien » qui exige du soliste un engagement émotionnel et intellectuel complet. » A l’écoute, la remarque un peu ésotérique à priori se mue en évidence.
Aussitôt après l’exposition du décor nocturne par les cordes, dès le début du premier mouvement, une méditation continue, réflexion sombre, paraissant presque improvisée, le traverse sans se laisser influencer par les changements de tempo ou les incidentes thématiques. Après le scherzo élégant du deuxième mouvement, la passacaille du troisième, en opposition complète avec le début de l’œuvre, sert de signature au compositeur. Les quatre cors, symboles du destin, résonnent dès le début du mouvement et appellent à une possible réconciliation avec la noble voix soliste. Puis une cadence, introvertie d’abord, rappelant les thèmes du concerto, s’accélère progressivement jusqu’à ce qu’éclate le dernier mouvement, « Burlesque », comme une fête, danse grinçante et agressive, qui conduit l’œuvre à son finale virtuose.
Voici ce quatrième et dernier mouvement, « Burlesque » (Allegro con brio – Presto) interprété par l’Orchestre de la Staastkapelle de Berlin dirigé par Heinz Fricke, avec en soliste le maître David Oïstrakh. Un moment d’anthologie!
Puissiez-vous partager l’enthousiasme du public du Staastoper de Berlin, ce soir là!
Sa lyre, qu’il avait reçue d’Apollon lui-même, voilà l’héritage que nous lègue Orphée. Mais quel héritage! La poésie, dont l’instrument reste définitivement le symbole. Et plus encore, quand on sait qu’à peine cette lyre entre ses mains, Orphée, en hommage aux neufs muses, ajouta deux cordes supplémentaires aux sept traditionnelles de l’instrument magique.
Eurydice à tout jamais perdue, Orphée inconsolable lui restera fidèle. Les Ménades lui feront payer de sa vie sa misogynie nouvelle. En furie, elles se précipiteront sur lui avec la plus grande cruauté. Après l’avoir tué et découpé en morceaux elles jetteront sa tête et sa lyre dans le fleuve Euros (l’Hèbre pour les grecs anciens). C’est sur les rivages de l’île de Lesbos, l’île de la Poésie, que des nymphes les retrouveront échouées.
Une légende raconte que l’on pouvait entendre encore les harmonies de la lyre, venant d’entre les flots, et que, parfois, du fond de son tombeau montaient vers les vivants les mélodies que chantait la propre voix d’Orphée.
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Ovide (43 avant JC – 17 après JC)
« Ses membres sont dispersés. Hèbre glacé, tu reçois dans ton sein et sa tête et sa lyre. Ô prodige ! Et sa lyre et sa tête roulant sur les flots, murmurent je ne sais quels sons lugubres et quels sanglots plaintifs, et la rive attendrie répond à ces tristes accents. »
Ovide – Chant XI « Les Métamorphoses »
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Abbé Jacques Delille (1738-1813)
Sur les sommets déserts des monts Hyperborées
Il pleurait Eurydice, et, plein de ses regrets,
Reprochait à Pluton ses perfides bienfaits.
En vain mille beautés s’efforçaient de lui plaire;
Il dédaigna leurs feux, et leur main sanguinaire,
La nuit, à la faveur des mystères sacrés,
Dispersa dans les champs ses membres déchirés.
L’Hèbre roula sa tête encor toute sanglante:
Là, sa langue glacée et sa voix expirante,
Jusqu’au dernier soupir formant un faible son,
D’Eurydice, en flottant, murmurait le doux nom:
Eurydice! ô douleur !… touchés de son supplice,
Les échos répétaient : Eurydice! Eurydice!
Abbé Delille
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Louise Ackermann (1813-1890)
Quand Orphée autrefois, frappé par les Bacchantes, Près de l’Hèbre tomba, sur les vagues sanglantes On vit longtemps encor sa lyre surnager. Le fleuve au loin chantait sous le fardeau léger. Le gai zéphyr s’émut ; ses ailes amoureuses Baisaient les cordes d’or, et les vagues heureuses Comme pour l’arrêter, d’un effort doux et vain S’empressaient à l’entour de l’instrument divin. Les récifs, les îlots, le sable à son passage S’est revêtu de fleurs, et cet âpre rivage Voit soudain, pour toujours délivré des autans, Au toucher de la lyre accourir le Printemps. Ah! que nous sommes loin de ces temps de merveilles ! Les ondes, les rochers, les vents n’ont plus d’oreilles, Les cœurs même, les cœurs refusent de s’ouvrir, Et la lyre en passant ne fait plus rien fleurir.
Louise Ackermann, « Contes et poésies » (1863)
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La lyre d’Orphée devenue relique fut déposée au temple d’Apollon. Un jour, le jeune Néanthe, usant de l’autorité qu’il estimait tenir de son père, tyran de la région, voulut faire chanter la lyre. Les chiens du voisinage accoururent aussitôt et constatant qu’elle ne jouait pas sous les doigts d’Orphée lui-même, dévorèrent l’usurpateur.
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Les peintres, autant que les poètes, se sont émus de la mort tragique d’Orphée :
La mort d’Orphée et les peintres
Un clic sur un tableau ouvre la galerie
Émile Jean Baptiste Philippe Bin – La mort d’Orphée 1874
Emile-Levy (1826-1890) – Mort d’Orphée
Gregorio LAZZARINI – Orphée et les Bacchantes – 1710
Louis-Bouquet – La mort d’Orphée -1925 -1939
Gustave Moreau – Jeune fille thrace portant la tête d’Orphée – 1865.
Gustave Moreau – Jeune fille thrace portant la tête d’Orphée -1875
Gustave Moreau – Jeune fille thrace portant tête d’Orphée sur sa lyre
John-William Waterhouse – Nymphes trouvant la tête d’Orphée – 1905
Car le poète est un four à brûler le réel. De toutes les émotions brutes qu’il reçoit, il sort parfois un léger diamant d’une eau et d’un éclat incomparables. Voilà toute une vie comprimée dans quelques images et quelques phrases. Pierre Reverdy