Vient de paraître sur « De braises et d’ombre » :
L’or du temps…
Un dialogue hors du temps entre François Perrier et Charles Dumont :
— Mais toi, tu n’auras rien parce que tu te veux libre.
— Je cherche l’or du temps et tu ne comprends pas.
Un dialogue hors du temps entre François Perrier et Charles Dumont :
— Mais toi, tu n’auras rien parce que tu te veux libre.
— Je cherche l’or du temps et tu ne comprends pas.
A la suite du billet du 23 juin dernier, Lumière blessée / 2 – Pour un regard de la fleuriste, consacré à une magnifique et très émouvante scène du film de Charlie Chaplin, « Les lumières de la ville », un de mes amis m’a adressé par e-mail la photo et le dialogue suivant.
Le partage s’imposait :
Albert Einstein à Charlie Chaplin :
– Ce que j’admire le plus dans votre art, c’est son universalité.
Vous ne dites pas un mot, et pourtant le monde entier vous comprend.
Charlie Chaplin lui répond :
– C’est vrai, mais votre gloire est plus grande encore : le monde entier vous admire, alors que personne ne vous comprend.
Il paraît que le dialogue est aussi véridique que la photographie. Dans le cas contraire, nous dirons en chœur et en italien : « Se non è vero, è ben trovato ! »
« Heureux deux amis qui s’aiment assez pour savoir se taire ensemble » disait Charles Péguy.
C’est assurément dans ce silence partagé que se reconstitue l’unité, la communauté intime propre à l’amitié, dans laquelle deux esprits naturellement affectés d’une grande considération réciproque fusionnent en une seule âme, laissant de fait les mots du dialogue, eussent-ils été des plus cordiaux, à leur humaine vanité. Il y a nécessairement dans l’amitié une part spirituelle qui finit toujours par se superposer au verbe jusqu’à le rendre au silence.
Mais doit-on pour autant ne pas reconnaître aux mots du dialogue toute leur force expressive quand la parole atteint, comme dans ces deux exemples empruntés au cinéma, à autant de sensibilité et autant de qualité à la fois esthétique et humaine ?
Il n’en demeure pas moins que, la connivence, la complicité, la considération, le respect, une fois échangés par l’entremise des mots, c’est dans le silence ultime et réciproque d’un simple geste, d’un regard ou d’une attitude spontanément adoptée dans une commune symétrie que s’exprime tout entier le sentiment profond d’amitié.
La vérité du dialogue ne résiderait-elle pas dans ses silences ?
Dans ce film de André Haguet de 1952, tiré de la pièce de Gilbert Cesbron, le Docteur Schweitzer (Pierre Fresnay), médecin missionnaire, vient dans les années 1910 au Gabon, alors colonie française, pour aider le pays à lutter contre le paludisme meurtrier qui sévit. Il y rencontre entre autres sérieuses difficultés, l’opposition de l’Administrateur de la région. Mais il trouvera le soutien du Père Charles (Jean Debucourt) avec qui il se lie d’amitié.
En 1936, Jean Renoir porte à l’image la pièce éponyme de Maxime Gorki, avec de jeunes acteurs très prometteurs : Jean Gabin et Louis Jouvet.
Pépel (Gabin) cambrioleur patenté se fait surprendre par le propriétaire de la maison qu’il est en train de dévaliser, un baron ruiné (Jouvet) qui attend la visite des huissiers qui vont tout saisir chez lui. Les deux hommes sympathisent et deviennent amis. Ce qui nous vaut cette scène bucolique d’amicales confidences interprétée magnifiquement.
Deux femmes, différentes, ô combien, sont réunies pour la première répétition d’une pièce de théâtre. Elles se retrouvent sur leur lieu de travail, la scène dans la brutale nudité des jours de besogne :
Hortense, actrice intuitive, instinctive, qui a connu quelque succès dans le vaudeville, ravie d’avoir obtenu un engagement, prise d’un permanent et irrépressible besoin de se raconter et Gertrude, auteur et metteur en scène de la pièce, intellectuelle un rien mégalomane au langage compliqué qui va essayer d’user de son ascendant pour soumettre sa comédienne aux exigences outrancières de son texte.
Rencontre de deux égocentrismes au cours de laquelle les incompréhensions seront inévitables. Promesse (tenue) de moments hilarants, et parfois douloureux, au milieu desquels on ne devrait pas être trop surpris de rencontrer sa propre caricature.
Dialoguer, est-ce toujours se rapprocher ?
La pièce de Victor Haïm (Molière 2003 du meilleur auteur dramatique français vivant) a été créée en 2002. Zabou Breitman l’a adaptée pour en donner une représentation à la télévision, avec Léa Drucker, à l’occasion des Molières de l’année 2011.
En voici le début :
Illustration musicale : Dvorak – Symphonie N° 9 – « Du nouveau monde »
– Fritz Reiner et le Chicago Symphony Orchestra –
Cette vie est un hôpital où chaque malade est possédé du désir de changer de lit. Celui-ci voudrait souffrir en face du poêle, et celui-là croit qu’il guérirait à côté de la fenêtre.
Il me semble que je serais toujours bien là où je ne suis pas, et cette question de déménagement en est une que je discute sans cesse avec mon âme.
– » Dis-moi, mon âme, pauvre âme refroidie, que penserais-tu d’habiter Lisbonne ? Il doit y faire chaud, et tu t’y ragaillardirais comme un lézard. Cette ville est au bord de l’eau ; on dit qu’elle est bâtie en marbre, et que le peuple y a une telle haine du végétal, qu’il arrache tous les arbres. Voilà un paysage selon ton goût ; un paysage fait avec la lumière et le minéral, et le liquide pour les réfléchir ! «
Mon âme ne répond pas.
– » Puisque tu aimes tant le repos, avec le spectacle du mouvement, veux-tu venir habiter la Hollande, cette terre béatifiante ? Peut-être te divertiras-tu dans cette contrée dont tu as souvent admiré l’image dans les musées. Que penserais-tu de Rotterdam, toi qui aimes les forêts de mâts, et les navires amarrés au pied des maisons ? «
Mon âme reste muette.
– » Batavia te sourirait peut-être davantage ? Nous y trouverions d’ailleurs l’esprit de l’Europe marié à la beauté tropicale. «
Pas un mot. – Mon âme serait-elle morte ?
– » En es-tu donc venue à ce point d’engourdissement que tu ne te plaises que dans ton mal ? S’il en est ainsi, fuyons vers les pays qui sont les analogies de la Mort.
– » Je tiens notre affaire, pauvre âme ! Nous ferons nos malles pour Tornéo. Allons plus loin encore, à l’extrême bout de la Baltique ; encore plus loin de la vie, si c’est possible ; installons-nous au pôle. Là le soleil ne frise qu’obliquement la terre, et les lentes alternatives de la lumière et de la nuit suppriment la variété et augmentent la monotonie, cette moitié du néant. Là, nous pourrons prendre de longs bains de ténèbres, cependant que, pour nous divertir, les aurores boréales nous enverront de temps en temps leurs gerbes roses, comme des reflets d’un feu d’artifice de l’Enfer! »
Enfin, mon âme fait explosion, et sagement elle me crie : » N’importe où ! N’importe où ! Pourvu que ce soit hors de ce monde ! «
Charles Baudelaire – Petits poèmes en prose – XLVIII
* C’est ainsi, avec espace, que Baudelaire a orthographié « anywhere ».
Écouter pour entendre. S’écouter pour s’entendre. S’entendre et communier !
Il ne faut que quelques mesures à ces deux là pour nous en faire une démonstration des plus convaincantes. Dès lors, toute l’attention qu’ils capteront de nous ne sera qu’admiration, plaisir, délectation. De l’œuvre évidemment – le Maître Beethoven n’est pas étranger à la chose – mais aussi, et sans l’ombre d’un doute, de l’accord parfait entre un violon et un piano qui s’observent respectueusement, se répondent avec la pertinence de la délicatesse et se rejoignent dans la lucidité de la nuance. Ils s’émeuvent l’un l’autre de leur dialogue dans lequel aucun d’eux, jamais, ne prétend imposer à son vis-à-vis la pertinence de son discours par la puissance de ses moyens. Communier dans la musique : une leçon de perfection !
Comme d’ailleurs la totalité de l’enregistrement des 10 sonates pour violon et piano de Beethoven qu’ont gravé il y a quelques mois Isabelle Faust et Alexander Melnikov, deux jeunes musiciens d’exception, deux formidables complices, qui rivalisent dans cette œuvre incontournable avec les plus mémorables duos de l’histoire, tels que Clara Haskil /Arthur Grumiaux, Martha Argerich / Gidon Kremer, Vladimir Ashkenazy / Itzak Perlman, ou encore le duo d’anthologie Pierre Barbizet / Christian Ferras, et les surpassent peut-être ici.
Smoking et robe de cérémonie sont restés au fond de la penderie. Un jean, une chemise, un pull, le silence intime et religieux d’un studio de travail et la musique, rien que la musique…
Beethoven : Sonate violon et piano Op.12 – N°2
2éme mouvement : Andante, più tosto Allegretto
Isabelle Faust joue le Stradivarius de 1702 « Belle au bois dormant »
Cette petite histoire est célèbre. On l’attribue souvent au pays basque, mais elle trouverait volontiers son origine un peu partout dans le monde.
Elle pose tout bonnement la question de la question et pourrait bien faire figure de koan du genre « Ce qui te manque, cherche le dans ce que tu as », tant elle fleure bon l’absurde.
Dans un petit village d’une campagne lointaine où les habitants – peu nombreux – ne sont pas réputés pour leur volubilité, vivait solitaire un vieux paysan, plus taiseux encore que le reste de la communauté. Sa grande distraction, après sa journée de labeur, consistait à faire une promenade le long de la route qui conduit au village, et sur laquelle ne passe pas grand monde, accompagné de ses deux chiens, l’un blanc, l’autre noir.
Ce soir là, comme tous les autres, le moment du retour venu, juste avant que la nuit efface complètement l’horizon, il s’arrête et d’un sifflement sec rappelle ses chiens pour les engager sur le chemin de la ferme. C’est alors qu’un inconnu, ostensiblement étranger à la région, s’approche de lui et le salue. N’ayant reçu pour toute réponse qu’un discret grognement, le passant souhaitant entamer un dialogue lui demande :
– Ils courent vite ces chiens?
– Lequel? répond le paysan.
Surpris par la réponse, l’homme décontenancé dit au hasard :
– Le blanc.
– Le blanc, oui! dit le paysan.
– Et le noir?
– Le noir aussi.
Silence prolongé. Les animaux haletants viennent de rejoindre le pied de leur maître. Le visiteur reprend :
– Ce sont de bons gardiens?
– Lequel? demande immédiatement le paysan.
– Le blanc, dit spontanément cette fois-ci, l’étranger.
– Le blanc oui!
– Et le noir?
– Le noir aussi.
Silence encore plus long, percé de temps à autre par un aboiement sourd. Le paysan s’apprête à repartir vers sa ferme quand le visiteur le questionne à nouveau :
– Pourquoi me demandez-vous toujours « lequel »?
– Parce que le blanc est à moi.
Grande réflexion perplexe du visiteur, suivie de l’inévitable question :
– Et le noir?
– Le noir aussi.
30 janvier 1963 : Crise cardiaque au 5 rue de Médicis à Paris – Francis Poulenc, 64 ans, est mort! La Musique est en deuil.
30 janvier 2013 : Cinquantième anniversaire de sa disparition. Formidable occasion de faire vibrer les tympans et les cœurs de ceux qui le connaissent peu ou qui ont laissé la poussière recouvrir les enregistrements de ses œuvres.
Ici pas de biographie du pianiste-compositeur, pas plus de catalogue de ses œuvres, les navigations internautiques conduisent vers de brillants exposés, savants et fort bien documentés. Plus nombreux encore à l’occasion de cette année de célébration. – Un site de référence : poulenc.fr/
Juste le désir d’exprimer l’affectueuse sympathie que je ressens depuis toujours à l’égard de sa musique, si riche et si multiple, et d’exhorter à son écoute. Pour le plaisir ; pour la beauté. Musique de « moine » et musique de « voyou ». – Le qualificatif « moine ou voyou » qui va si bien à Poulenc, lui a été donné par un critique de l’époque pour souligner les deux aspects de son œuvre :
Musique de « voyou », pleine de fantaisie, de gaité et de provocation parfois, avec lesquelles cet amoureux de la voix et de la poésie assaisonne ses mélodies, ses nombreuses partitions pour le piano, ou sa musique de chambre. (« Humoresque » pour piano, sonates pour flûte, pour violon, pour clarinette, « Bal masqué », « Fiançailles pour rire », « Les mamelles de Tirésias » etc…).
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Musique de « moine », teintée d’une profonde spiritualité, témoignage de sa foi catholique qui inspire ses compositions de musique sacrée, comme ses « Gloria », « Salve Regina », « Stabat Mater » ou « Litanies à la Vierge noire ». Et le poignant « Dialogue des Carmélites » tiré de l’œuvre de Georges Bernanos.
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Splendide! ♥♥♥♥♥
Les religieuses condamnées par les autorités révolutionnaires montent à l’échafaud, une par une, Salve Regina aux lèvres. Ses sœurs exécutées, Blanche de la Force, entrée au Carmel pour chercher ses raisons d’exister, trouve enfin réponse à ses doutes et offre elle aussi son cou à la lame.
Mais toujours musique savante, éclectique, évoluant dans des univers aussi différents que passionnants. D’apparence parfois superficielle, elle révèle volontiers à l’auditeur attentif les trésors de ses profondeurs et les subtilités de ses charmes.
Quand j’évoque Francis Poulenc, je ne peux jamais résister au souvenir de cette anecdote que me racontait souvent un de mes très chers amis, aujourd’hui disparu depuis plus de dix ans. Etudiant au conservatoire de Paris, Jean-Claude travaillait la composition avec Nadia Boulanger (excusez du peu!). Un jour qu’il était au piano et jouait pour les oreilles expertes de son professeur, attendant ses inévitables observations, Jean-Claude sentit dans son dos que quelqu’un la rejoignait, et s’interrompit. Francis Poulenc, grand ami de Nadia Boulanger venait d’arriver et s’installait à ses côtés. Soucieux de laisser les deux musiciens à leur intimité, Jean-Claude était sur le point de se retirer, mais Nadia lui laissa juste le temps de saluer l’illustre visiteur et l’invita vivement à reprendre depuis le début l’ « Allegro de concert » de Granados qu’il interprétait avant l’interruption. Sueurs froides! Jouer devant Nadia Boulanger, soit, c’était le professeur, mais devant Poulenc… l’affaire n’était pas si simple.
Je retrouvais chaque fois dans son récit, des dizaines d’années après l’évènement, la terrible émotion qui avait dû être la sienne à l’époque, et qu’il n’est pas difficile d’imaginer. Ses doigts, je crois, réussirent à ne pas trop écorcher Granados, tant bien que mal. Cette aventure ne menaça en rien son premier prix d’harmonie.
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