J’ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
Baiser montant aux yeux des mers avec lenteurs,
La circulation des sèves inouïes,
Et l’éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs !Rimbaud – Le bateau ivre
Quel voyage !
Depuis que Shakespeare, en 1600, lui fait subir le sort tragique que l’on sait, Ophélie, douce et tendre Ophélie, ne cesse, ainsi qu’un bateau ivre, de descendre les fleuves pas toujours impassibles de l’histoire et d’être transportée par les courants de toutes époques, de la plume du poète au pinceau du peintre, du noir et blanc de la portée aux couleurs de la pellicule.
Et puis au fil des ondes, un jour, s’installe pour un instant dans notre canapé, se glisse par surprise dans la chanson d’un chanteur à la mode et apaise même parfois la fureur électrique de ses guitares.
Ophélie sur écran cathodique, qui l’eût cru ? Dans la fumée blanche d’une cigarette de Gainsbarre… Dans la crinière blonde d’un romantique rockeur nommé Johnny…
Quel chemin parcouru depuis les vieux tréteaux au décor d’un palais d’Elseneur, d’où un jeune prince, perplexe ou fou, interpelait pour toujours l’humanité par sa simple question !
Démarrage de la chanson à 1:00
Tu t’en vas à la dérive
Sur la rivière du souvenir
Et moi, courant sur la rive,
Je te crie de revenir
Mais, lentement, tu t’éloignes
Et dans ma course éperdue,
Peu à peu, je te regagne
Un peu de terrain perdu.De temps en temps, tu t’enfonces
Dans le liquide mouvant
Ou bien, frôlant quelques ronces,
Tu hésites et tu m’attends
En te cachant la figure
Dans ta robe retroussée,
De peur que ne te défigurent
Et la honte et les regrets.Tu n’es plus qu’une pauvre épave,
Chienne crevée au fil de l’eau
Mais je reste ton esclave
Et plonge dans le ruisseau
Quand le souvenir s’arrête
Et l’océan de l’oubli,
Brisant nos cœurs et nos têtes,
A jamais, nous réunit.
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Un saule penché sur le ruisseau
Pleure dans le cristal des eaux
Ses feuilles blanchesOphélie tressant des guirlandes
Vient présenter comme une offrande
Des fleurs, des branchesPour caresser ses boutons d’or
Pour respirer son jeune corps
Le saule se pencheMais sous elle un rameau se brise
Le saule en pleurs la retient prise
De part sa mancheOphélie lui dit « qu’il est bon »
Quand le ruisseau dans un frisson
Casse la brancheOphélie file au fil de l’eau
Qui vient gonfler son blanc manteau
Contre ses hanchesSon cri s’éteint comme une joie
La boue immonde où elle se noie
Prend sa revancheUn saule penché sur le ruisseau
Pleure dans le cristal des eaux
Ses feuilles blanches
découverte de la chanson de Gainsbourg – pas une des meilleures me semble-t-il mais qui berce joliment la noyée
Je ne sache pas d’ailleurs qu’elle ait connu grande diffusion ou grand succès, très vite, semble-t-il, noyée et emportée par le flot tumultueux des réussites de son auteur…
Ophélie fédère autour de sa souffrance un panel d’artistes prestigieux !
Merci de remettre en lumière cette chanson de Gainsbourg, sa poésie est souvent restée cachée derrière d’autres succès plus spectaculaires. Quant à Rimbaud, laissons couler ses mots au fils de nos veines… Grand merci pour ce menu !
Merci à vous !
Ophélie a eu tellement d’admirateurs parmi les artistes que les occasions agréables de la retrouver ne manquent pas. De nombreux plaisirs sont encore au menu, grâce à elle… Mais j’essaierai de nous éviter l’indigestion.
Bonjour.affinités? J’ai le même poème dans mon blog..joli partage..je ne sais pas comment j’arrive ici:) pardon si j’arrive en intruse..ce n’était pas ma volonté..avec votre permission je reviendrai?
Vous êtes la bienvenue sur ces pages. Et si vous décidez d’y revenir de temps à autre, vous y serez accueillie avec plaisir… C’est un mot qui compte ici, vous le constaterez sans doute…
A bientôt !
Bonsoir et merci pour cette réponse rapide ..alors,je vais faire ma curieuse et visiter ma découverte inattendue:) merci
ravie de vous découvrir bonne journée:)
Pingback: Ophélie /7 – « Un chant mystérieux tombe des astres d’or » – De braises et d'ombre…