Recette de femme

Que les très laides me pardonnent mais la beauté est fondamentale.
Il faut dans tout cela qu’il y ait quelque chose d’une fleur, quelque chose d’une danse, quelque chose de haute couture dans tout cela (ou alors que la femme se socialise élégamment en bleu comme dans la République Populaire Chinoise). Il n’y a pas de moyen terme.

Evan Wilson  (né en 1953)

Evan Wilson (peintre né en 1953) – Etats Unis

Il faut que tout soit beau. Il faut que, tout à coup on ait l’impression de voir une aigrette à peine posée, et qu’un visage acquière de temps en temps cette couleur que l’on ne rencontre qu’à la troisième minute de l’aurore.

An He (né en 1957)

An He (né en 1957)

Il faut que tout cela soit sans être, mais que cela se reflète et s’épanouisse dans le regard des hommes.
Il faut, il faut absolument que tout soit beau et… inespéré.
Il faut que des paupières closes rappellent un vers d’Eluard, et que l’on caresse sur des bras quelque chose au-delà de la chair : et qu’au toucher ils soient comme l’ambre d’un crépuscule.

Julie Swan - Australia

« Just being » by Julie Swan – Australie

Ah, laissez-moi vous dire qu’il faut que la femme qui est là, comme la corolle devant l’oiseau soit belle, ou qu’elle ait au moins un visage qui rappelle un temple ; et qu’elle soit légère comme un reste de nuage : mais un nuage avec des yeux et des fesses.

Yuri Yarosh

Yuri Yarosh (né en 1969) – Biélorussie

C’est très important les fesses. Les yeux, cela va sans dire, qu’ils regardent avec une certaine malice innocente.
Une bouche fraîche (jamais humide), mobile, éveillée, et aussi d’une extrême pertinence.

Fulvio De Marinis

Fulvio De Marinis (né en 1971) – Italie

Il faut que les extrémités soient maigres, que certains os pointent, surtout la rotule, en croisant les jambes, et les pointes pelviennes lors de l’enlacement d’une taille mobile.
Très important toutefois demeure le problème des salières, une femme sans salières est comme une rivière sans ponts.

Andrej Belle (Peintre né en 1957 à Minsk)

Andrej Belle (Peintre né en 1957 à Minsk)

Il est indispensable qu’il y ait une hypothèse de petit ventre, et qu’ensuite la femme s’élève en calice et que ses seins soient une expression gréco-romaine, plus que gothique ou baroque et qu’ils puissent illuminer l’obscurité avec une force d’au moins 5 bougies.

Alexander Shubin

Alexander Shubin – peintre russo-canadien

Il faut absolument que le crâne et la colonne vertébrale soient légèrement visibles et qu’il existe une grande étendue dorsale…

Li Wentao

Li Wentao – jeune peintre pékinois

Que les membres se terminent comme des hampes, mais qu’il y ait un certain volume de cuisses. Qu’elles soient lisses, lisses comme des pétales et couvertes du duvet le plus doux, cependant sensible à la caresse en sens contraire.

Aaron Westerberg

Aaron Westerberg

Les longs cous sans nul doute sont préférables de manière à ce que la tête donne parfois l’impression de n’avoir rien à voir avec le corps et que la femme ne rappelle pas les fleurs sans mystère.

Vasyl Fedoruk

Vasyl Fedoruk – Ukraine

Les pieds et les mains doivent contenir des éléments gothiques discrets. La peau doit être fraîche aux mains, aux bras, dans le dos et au visage mais les concavités et les creux ne doivent jamais avoir une température inférieure à 37° centigrades, capables, éventuellement, de provoquer des brûlures du premier degré.

Jia Lu

Jia Lu

Les yeux, qu’ils soient de préférence grands et d’une rotation au moins aussi lente que celle de la terre; qu’ils se placent toujours au-delà d’un mur invisible de passion qu’il est nécessaire de dépasser.

Faiza Maghni

Faiza Maghni – peintre algérienne (Oran)

Que la femme, en principe, soit grande ou, si elle est petite, qu’elle ait l’altitude mentale des hautes cimes.
Qu’elle surgisse, qu’elle ne vienne pas ; qu’elle parte, quelle n’aille pas.
Et qu’elle possède un certain pouvoir de rester muette subitement, et de nous faire boire le fiel du doute.

Julie Swan

Julie Swan – Sculptrice australienne

Oh, surtout qu’elle ne perde jamais, peu importe dans quel monde, peu importe dans quelles circonstances, son infinie volubilité d’oiseau, et que caressée au fond d’elle-même, elle se transforme en fauve sans perdre sa grâce volatile; et qu’elle répande toujours l’impossible parfum ; et qu’elle distille toujours le miel enivrant ; et qu’elle chante toujours le chant inaudible de sa combustion et qu’elle ne cesse jamais d’être l’éternelle danseuse de l’éphémère.

Marcos Damascena

Marcos Damascena – Peintre hyperréaliste né en 1981 – Brésil

Et dans son incalculable imperfection qu’elle constitue la chose la plus belle et la plus parfaite de toute l’innombrable création.

Vinicius de Moraes  (1913-1980)

Vinicius-de-Moraes4

Personnage majeur et charismatique de la musique brésilienne, parolier de centaines de titres mondialement connus et joués, interprète parfois de ses chansons avec les grands de la bossa-nova et de la samba, et poète à l’âme particulièrement romantique.

9 réflexions sur “Recette de femme

  1. Magnifique ce texte ! On voudrait tout citer. Il a tout vu le bougre… sauf peut-être un tendon d’Achille bien creusé qu’on associerait volontiers avec ces salières (dont j’ai appris le mot) si bien décrites. Merci.

    • Quel beau et juste texte, en effet! Et poétique!
      « Tendon d’Achille »… Voilà qui pourrait me laisser penser que derrière l’esthète se cache, peut-être, un… marathonien… Pas vous?
      Merci d’avoir partagé ce plaisir avec moi.

    • Ce qui compte, ce n’est pas forcément d’être tout cela, mais que tout cela soit plutôt contenu dans le regard de l’homme…
      Merci d’avoir apprécié ce que j’appellerais volontiers un « petit poème en prose », façon Brésil.

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  3. Je n’aime pas du tout ce texte qui transforme la femme en potiche !!! (belle de préférence). Ah la la , ça m’énerve, ça m’énerve … Il ne lui reste plus qu’à poser dans un cadre luxueux… Je préfère d’autres critères d’appréciation de ce qu’une femme peut-être : intelligence, courage, sensibilité, honnêteté, charme, talent etc etc

    • Il y a, ma chère Christiane, contenu dans votre indignation, tout l’éternel débat esthétique et moral concernant le nu dans l’art. Je ne prendrai donc pas le risque de le poursuivre ici, mais je gage qu’une occasion nous sera sans doute un jour offerte pour que nous échangions de vive voix nos points de vue. Ce sera un plaisir pour moi.
      Je ne crois pas que l’auteur du texte ait voulu dénier aux femmes les mille autres qualités humaines qui, à mon sens, ne dépendent pas du genre; je pense simplement que ce n’était pas là son propos, ayant centré son regard sensuel sur les seuls aspects physiques de la femme, comme Boucher sur son « odalisque » ou Botticelli sur sa « Vénus ».
      Je ne suis pas sûr que le David de Michel-Ange ou l’Apollon du Belvédère nous incite à réfléchir aux valeurs nombreuses et non physiques (intelligence, courage, sensibilité, honnêteté, charme, talent, etc… etc…) qui font la qualité des hommes.

      Je ne peux imaginer qu’un esprit affiné comme le vôtre se laisse aller à un féminisme « tripal », et reste persuadé que votre colère, fort légitime, n’aurait pas résisté à moins de spontanéité.

      • Oui, ce serait bien…
        Ce que je regarde d’abord chez l’autre c’est son regard, ses gestes. J’écoute sa voix, ses silences. La beauté ? elle est dans ces tous petits détails qui n’appartiennent qu’à l’être aimé et qui seraient peut-être pour d’autres un défaut ou une banalité. La beauté dans l’art et le nu féminin ? nous en discuterons un jour à Montmartre ou ailleurs. Au Louvre ou à Orsay, à Beaubourg ou à Guimet… au musée Rodin ou Picasso, dans les jardins de la villa d’Este ou ailleurs. Le monde est grand…
        Féministe « tripal » ? non, pas vraiment mais femme, oui !

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